MEMORANDUM DE LA COMMUNAUTE BANYAMULENGE
Introduction
Ce mémorandum est produit par la société civile de la communauté Banyamulenge à l'occasion de la conférence sur la paix, la sécurité et le développement des provinces du Sud Kivu et du Nord Kivu, organisée par l'Etat congolais (RDC).
Son objectif est d'attirer l'attention de la communauté internationale sur les multiples violations des droits humains dont sont victimes les communautés Tutsi de la RDC et particulièrement les Banyamulenge.
Ce document partage l'expérience de la persécution dont les Banyamulenge ont été victimes depuis des décennies sur le territoire de leur propre pays. Il constitue en outre un véritable cri d'alarme lancé pour une population en danger, menacée d'extermination par les forces négatives et terroristes coalisées, en l'occurrence les Mai Mai congolaises, les EX-FAR/ Interahamwe rwandaises ainsi que les FN-Palipehutu burundaises avec la bénédiction et la complicité du gouvernement de Kinshasa.
Ce document est structuré en quatre points essentiels : une brève présentation des Banyamulenge, l'origine et le développement de la haine anti-tutsi/Banyamulenge en ex-Zaïre, les conséquences de cette situation ainsi que les propositions de solution à cette crise.
1. Brève présentation des Banyamulenge
Les Banyamulenge sont des Tutsi d'origine rwandaise basés sur les hauts plateaux du Sud Kivu à l'Est de la RDC. Selon des sources concordantes, l'établissement des Banyamulenge sur le territoire de l'actuel RDC s'est fait longtemps avant la colonisation de l'Afrique. Ils provenaient de la région de la rive Est de la rivière Ruzizi et du Lac Tanganyika.
D'après Depelchin, les Banyamulenge se trouvaient déjà établis dans la plaine de la Ruzizi entre 1797 et 1890 . Pour Kagame Alexis, les Banyamulenge auraient commencé à occuper l'actuel zone d'Uvira entre 1576 et 1609. Quant à Maquet JJ, l'établissement des Banyamulenge dans la zone d'Uvira se situe au début du 19e siècle.
Ces différents auteurs ont désigné ce peuple tantôt sous le terme 'Tutsi d'Itombwe', tantôt 'Pasteurs d'Itombwe' ou encore 'Banyarwanda'.
Les sources orales consignées par l'administration coloniale rapportent qu'après leur traversée de la Ruzizi, les Banyamulenge s'installèrent à Kakamba dans la plaine de la Ruzizi. Ils n'y resteront pas très longtemps car le climat semi-aride de la plaine, la malaria ainsi que la trypanosomiase bovine les avaient obligés de quitter ce milieu hostile à la vie. Ils arrivèrent ainsi à Mulenge (1800 m d'altitude) où ils s'établiront et deviendront, plus tard, leur grand centre, d'où le toponyme Banyamulenge.
Comme on peut le voir à travers ce rappel, ce peuple s'est installé sur le territoire de l'actuelle RDC il y a de cela plus ou moins 2 siècles. C'est-à-dire bien avant la création de l'Etat Indépendant du Congo (1885-1908), le Congo belge (1908-1960) et le Congo indépendant avec ses différentes appellations : République Démocratique du Congo à l'indépendance, République du Zaïre sous le régime de Mobutu avant d'être rebaptisé Republique Démocratique du Congo sous Laurent Désiré Kabila.
En dépit de ces preuves irréfutables, l'acceptation des Banyamulenge comme des Congolais à part entière a fait couler beaucoup de salive, d'encre et même de sang comme en témoignent les exemples suivants :
• En 1969, par sa lettre n° 212-2220-054-A.I.C-69 du 16 juin 1969 adressée au Commissaire de district du Sud Kivu, le citoyen Gouverneur de province du Kivu, M. TAKIZALA, précise que « les Banyarwanda d'Itombwe (Banyamulenge) sont parmi les ethnies fondatrices de l'Etat Indépendant du Congo et qu'ils sont congolais d'origine ».
• Dix ans après, le Mwami Lenghe, Chef de collectivité Bavila, écrivait dans sa lettre n° 5072/132/1979/FO3MCD/79 du 06 juin 1979, adressée au commissaire de région du Kivu : « l'établissement des Banyamulenge dans ma collectivité date de la fin du XVIIe et le début du 19e siècles. Ces dates sont le résultat d'une enquête minutieuse menée par moi auprès des vieux sages Bavira ».
Malgré tous ces aveux des responsables politiques, pour ne citer que ceux-là ; il est triste, regrettable et fort déplorable de voir que chaque fois que le besoin se présente des 'politiciens' avides du pouvoir n'hésitent pas à falsifier l'histoire pour des intérêts purement et simplement égoïstes et despotiques car ils ne trouvent pas mieux à proposer aux populations congolaises que la division, la discrimination, l'exclusion, la haine, la négation des droits de l'autre jusqu'aux plus élémentaires, y compris le droit à la vie.
2. Naissance et développement de la haine anti-Tutsi/Banyamulenge
• Origines de la haine anti-Tutsi en RDC
Pour bien comprendre les événements de notre temps, il est important si pas nécessaire de nous référer au passé. En effet, suite aux événements malheureux survenus au Rwanda en 1959 quand les premiers massacres collectifs et sélectifs contre les Tutsi furent organisés par les extrémistes hutu sous la houlette du pouvoir colonial ; un sentiment anti-tutsi s'est développé dans la région des Grands Lacs.
Le Tutsi fut alors défini et identifié comme ennemi des Hutu, avec comme argument que les Tutsi, ces 'envahisseurs' minoritaires ne devaient pas diriger les Hutu majoritaires.
L'avènement des régimes de la première et la deuxième république au Rwanda n'a pas du tout contribué à améliorer la situation au Rwanda. Bien au contraire, les divisions ont été cultivées et renforcés mais aussi extrapolées et exportées au delà des frontières nationales. Il s'agissait en réalité de créer une sorte de conscience collective 'bantoue' contre les Tutsi par tous les moyens y compris le génocide.
L'Est de l'ex-Zaïre, zone où se trouvent beaucoup de Rwandophones rendus Congolais par Berlin pour avoir délimité les frontières entre les Etats de manière arbitraire, fut la première destination de cette idéologie. Fondée sur la haine ethnique, celle-ci a fort malheureusement réussi a gagné du terrain et à conquérir des esprits naïfs envahissant ainsi les pays voisins du Rwanda si bien que la question ethnique (hutu-tutsi) a été internationalisée et est actuellement devenue le virus qui ronge la région des Grands Lacs. Ses victimes se comptent aujourd'hui en terme des millions : morts, réfugiés, déplacés, orphelins, veuves et un cortège de malheurs devenus presque le quotidien des habitants de cette région : famine, guerre, massacres, génocide, viols, etc.
Sans prétendre être exhaustif, voici la chronologie du développement de la haine anti-tutsi à travers ses faits marquants.
• Sous le régime de Mobutu
A l'occasion de l'accession du pays à l'indépendance, des conflits entre les Banyamulenge et les autres communautés étaient déjà perceptibles. En 1964 éclate la rébellion muléliste. Partie de l'Ouest du pays, celle-ci atteindra la partie Est de la RDC la même année. En 1965, Mobutu prend le pouvoir. Jusqu'alors il n'y avait vraiement pas des conflits majeurs déclarés entre les Banyamulenge et leurs voisins Bafulero, Bavira, Babembe, etc.
Les Banyamulenge ralliés au pouvoir central s'attireront la haine des autres communautés qui étaient plutôt rangées du côté de la rébellion. Voilà ce qui explique que l'insurrection qui, au départ était dirigée contre le pouvoir de Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa) s'est subitement transformée en véritable chasse aux Banyamulenge.
Comme ils combattaient aux côtés des forces loyalistes, les Banyamulenge se sont vus attaquer par leurs voisins. Beaucoup de gens furent tués et leurs biens spoliés. Il y eut les massacres sélectifs de Kirumba (19/02/19966), de Gahwera (juin 1966), de Gatongo (16/08/1966), etc. qui ont fait des centaines des victimes parmi les Banyamulenge.
Entre 1964 et 1984, l'Est de l'ex-Zaïre a été déchirée par cette rébellion qui a fait beaucoup de victimes et de dégâts matériels. Certaines de ses figures de proue ont fait leur réapparition tout récemment, lors de la guerre dite « première guerre de libération », en 1996. Il s'agit entre autres de Laurent Désiré Kabila, ancien chef rebelle dans le maquis de Hewa bora dans la zone de Fizi, de Dunia Aochi, de Ndalo Shabani et de Zabuloni et autres seigneurs de guerre qui aujourd'hui sont devenus des commandants supérieurs de l'armée de Joseph Kabila au sein de laquelle ils occupent des postes stratégiques.
L'année 1984 correspond à la fin de la rébellion muléliste. Mais en réaliste cette année ne marque pas la fin des conflits à caractère ethniques entre les Banyamulenge et leurs voisins.
Certains hommes politiques originaires du Sud Kivu dont Anzuluni Bembe (ancien président de l'Assemblée Nationale Zairoise) et Mwenemalungu (ancien député au parlement) soutenus par le régime de Kinshasa d'alors firent également de la haine contre les Banyamulenge leur cheval de bataille dans les campagnes électorales et chaque fois qu'ils voulaient déstabiliser le Sud Kivu pour se maintenir au pouvoir. Ils alors appelés à plusieurs reprises les populations locales à éliminer physiquement les Banyamulenge et à expulser les rescapés au Rwanda.
Si ce désir ardent n'avait pas été accompli alors, les Banyamulenge avaient été fréquemment victimes de divers supplices, des tortures psychologique, politique et physique (emprisonnements arbitraires et répétitifs, refus de droit d'élire et d'être élu, scènes d'humiliations publiques par l'armée et autres instances de sécurité, etc.).
Dans les années 1990, un slogan se développe dans le Sud Kivu, de Bukavu à Fizi en passant par Uvira, Baraka et d'autres centres côtiers du lac Tanganyika : RRRR (Recensement de Rendre les Rwandais au Rwanda). Ces Rwandais dont il est question ici ne sont autres que les Banyamulenge. Au même moment, un recensement des Banyamulenge est organisé par le pouvoir central sur instigation des hommes politiques originaires du Sud Kivu, afin de connaître le nombre des ces 'étrangers' avant de les expulser vers le Rwanda. Entre temps, les attaques mortelles sont régulièrement organisées contres les pâturages des Banyamulenge, les persécutions, les tortures par l'armée et les services secrets ainsi que les pillages systématiques.
L'idéologie génocidaire contre les Banyamulenge a atteint son paroxysme entre 1993 et 1995. L'arrivée des réfugiés Hutu Burundais et Rwandais du Président Melchior Ndadaye pour les premiers, la guerre et le génocide pour les seconds ont contribué à l'exacerbation de la haine contre les Tutsi congolais que les réfugiés assimilaient aux Tutsi de leurs pays respectifs et qui, en réalité, étaient des témoins gênants pour la création d'une base arrière en RDC en vue d'une éventuelle reconquête du pouvoir au Rwanda et au Burundi.
En 1996, la guerre qui a éclaté contre le régime de Mobutu à partir de l'Est de la RDC a servi de prétexte pour les autorités en vue d'exécuter leur plan génocidaire contre les Tutsi. Elles s'associent aux milices Interahamwe bien 'expérimentés' en matière de génocide après le forfait qu'il avait commis sur les Tutsi du Rwanda en 1994. Au nom de la famille bantoue, les populations locales (Bashi, Babembe, Bavira, Bafulero, etc.) sont vite mobilisées pour exterminer les Tutsi congolais dans le plus bref délai sous le même mobile ethnique.
Ainsi seront organisés les massacres de Bibogobogo, d'Uvira, de Bukavu, de Kamanyola au Sud Kivu et en beaucoup d'autres localités au Nord Kivu, etc. Les populations qui qui n'ont pas fui vers le Rwanda sont réduites au silence et sporadiquement attaquées par les Mai Mai (milice tribale progouvernementale et anti-tutsi). Il s'agit dans toutes ces situations des violations des droits de la personne institutionnalisées par l'Etat.
• Sous Kabila I
L'arrivée de Laurent Désiré Kabila au pouvoir n'a fait qu'empirer la situation des Banyamulenge qui l'avaient pourtant accompagné dans sa longue et pénible marche vers le pouvoir jusqu'à Kinshasa. Après le divorce avec ses alliés Rwandais et Ugandais consommé en juillet 1998, une nouvelle guerre éclata encore à partir de l'Est du pays. Kabila organise la chasse à l'homme Tutsi dans toutes les villes de la RDC. Il commence par les militaires, ceux-là même qui ont combattu pour lui. Il développe une exceptionnelle méchanceté de la population à procéder à l'épuration ethnique des Tutsi et de tous ceux qui leur ressemblent.
Pour y parvenir, il s'entoure d'hommes extrêmement dangereux et extrémistes à l'instar d'un Yerodia Abdoulaye Ndombasi ancien ministre des affaires étrangères et plus tard Vice-président de la république sous Kabila II, récompensé justement pour sa haine prononcée contre les Tutsi. En plus d'un discours à l'accent fasciste, Yerodia est connu pour avoir orchestré les actes de barbarie commis à l'endroit des Tutsi tant civils que militaires dans la ville de Kinshasa. Ce sont ces crimes dont il a à rendre compte devant la Cour Pénale Internationale.
Comme dans tous les génocides, Yerodia, psychanalyste de formation, recourt à la chosification, à la diabolisation de la personne des Tutsi pour effacer les hésitations de la population à tuer, ce qu'il a réussi ! Dans cette logique, il qualifie les Tutsi, et dans les médias, 'des vermines à écraser'.
Comme si cela ne suffisait pas, son Président et ami Laurent Désir é Kabila, faisait des appels pressants en vue d'exterminer les Tutsi. Nous en voulons pour preuve l'extrait de l'un de ses discours génocidaires : « Prenez les lances, flèches, armes…sinon on deviendra esclaves des Tutsi ».
L'une de nombreuses conséquences de cet appel médiatisé fut les massacres sélectifs de 300 sous officiers Tutsi congolais du camp de Kamina en 1998. Pour y parvenir, Kabila a dépêché l'ancien Chef d'Etat major à la présidence, le Colonnel Eddy Kapend avec le Médecin directeur de l'hôpital de la base de Kamina, le Major Vangu en vue d'exterminer les candidats officiers Tutsi. Ces Tutsi furent systématiquement tués par leurs compagnons d'armes à l'instigation de ces hauts responsables sous l'admiration et l'applaudissement de leurs instructeurs Tanzaniens, gagnés eux aussi par l'idéologie bantoue.
La haine ethnique contre les Tutsi, ainsi entretenue et attisé par les sommités de l'Etat ne pouvait que gagner une grande partie de la population. Au Sud Kivu, les relations entre les Banyamulenge et leurs voisins ont été plus envenimées par ces intoxications entraînant ainsi une série de tueries sélectives cycliques qui ont plongé la communauté Banyamulenge dans un deuil interminable qui dure maintenant plus d'une décennie.
• Sous Kabila II
'Tel père, tel fils' dit la sagesse populaire. Joseph Kabila qui passait ironiquement pour sérieux et compréhensif aux yeux de beaucoup de gens n'a pas tardé à prouver qu'il est réellement fils de Kabila et ainsi dévoiler sa vraie face : celle qui le fait ressembler le plus à son père. Sa ruse est ornée d'une méchanceté énorme.
Peu après l'assassinat de son père en 2000, il affiche sa ferme volonté à poursuivre l'idéologie ethnique de feu son père. Pour preuve il nomme Yerodia, criminel de renom, Vice-Président de la république bien que ce dernier soit poursuivi pour crime de génocide perpétré à l'endroit des Tutsi. Ainsi Kabila va s'investir, corps et âme, dans la négation du génocide en protégeant les génocidaires venus d'autres cieux. Plus stratège que son père, il crée et/ou encourage les médias de la haine pour nourrir de son idéologie la plus grande partie de sa population. Le site internet « www.
digitalcongo.net » tenu sa sœur, les journaux comme l'Avenir et demain le Congo ainsi que la Radio-Télévision Nationale du Congo (RTNC) constituent les principaux canaux d'endoctrinement à l'idéologie de la haine anti-tutsi.
A titre d'exemple, Demain le Congo affirmait gratuitement fin 2003, que les guerres qui ont secoué la RDC depuis 1996 ont fait 3. 500 000 victimes parmi lesquelles aucun Munyamulenge ! Ce n'est pas parce que ce journal n'était pas au courant que des milliers des Banyamulenge avaient été tué mais parce que sa volonté, son souhait est de las voir exterminer.
Ah, quelle méchanceté, quelle banalisation des événements malheureux qui ont endeuillé continuellement tout un peuple ! Par ailleurs, une des associations des droits humains basée à Kinshasa a eu le courage de dénoncer, mi 2003, le ton génocidaire qu'ont adopté beaucoup d'organes de presse en RDC.
Comme pour 'décentraliser' la campagne de haine ethnique contre le Banyamulenge, les médias ainsi que la société civile de Bukavu au sein de laquelle l'Eglise catholique de Bukavu joue un rôle de premier plan, ont multiplié l'effort d'intoxication ethnique. Il s'agit notamment de la Radio Maria, de la Radio Maendeleo et de la RTNC agence du Sud Kivu.
A plusieurs reprises, ces médias ont préconisé l'extermination des Banyamulenge ou tout au moins leur expulsion comme 'solution finale'. Mais solution à quel problème ? En quoi la physionomie d'un peuple peut-elle être un problème ? Quelle est la forme morphologique qui convient pour se faire accepter au Sud Kivu ?
Suite à cette propagande haineuse par les médias, des populations innocentes Tutsi à Bukavu furent inhumainement tuées entre fin mai et mi juin 2004 par des éléments de la 10e région militaire sous le commandement du Général Mbudja Mabe. La volonté de Joseph Kabila de commettre le génocide contre les Banyamulenge se révèle également à travers la nomination des officiers à la tête de la 10e région militaire (Sud Kivu).
Après le Général Nyabyolwa qui avait reçu officiellement la mission de détruire l'ancienne armée du RCD, en utilisant tous les moyens y compris les tueries des civils innocents et les arrestations arbitraires des officiers à l'insu de son adjoint d'alors, le Colonnel Jules Mutebutsi ; c'était le tour de Général Mbudja Mabe, aussi méchant que son prédécesseur.
C'est lui qui a dirigé la réunion qui a préparé et exécuté le génocide des Banyamulenge réfugiés dans le camp de Gatumba, au Burundi. Si non comment expliquer que les auteurs du forfait de Gatumba soient venus du territoire congolais (Kiliba) où ils se sont repliés après le carnage sans être inquiétés, jusqu'à maintenant ?
Des sources dignes de foi précisent que Mbudja Mabe était entouré des Colonels Mai Mai Dunia, Kayamba et Nakabaka très connus dans la région pour leur extrémisme contre les Tutsi. Ce dernier, commandant de la brigade qui contrôlait alors Uvira n'hésitait pas personnellement à réfuter la nationalité des Banyamulenge arguant que si ceux-ci ne veulent pas 'chez eux' (sous entendu au Rwanda), il résoudra la question à sa manière. Chose promise chose due : il viole les frontières pour aller exterminer les Banyamulenge au Burundi où ils s'étaient réfugiés.
Chose criante, Kabila II a délibérément renforcé les liens avec toutes les forces négatives qui opèrent à l'Est de la RDC dont les Mai Mai, les FNL-PALIPEHUTU du Burundi, les ex-FAR/Interahamwe. Cette coalition génocidaires est responsable du génocide de Gatumba qui a coûté la vie à 166 personnes et rendus des dizaines d'autres vulnérables, incapables de se prendre en charge. Cette barbarie humaine survenue dans la nuit du 13/08/2004 a eu lieu au vu et au su de la communauté internationale, représentée au Burundi par l'ONUB dont le silence jusqu'à cette date laisse songeur.
Depuis ce forfait, le régime de Kinshasa n'a jamais posé un geste de nature à rendre justice : punir les coupables et réhabiliter les victimes. Par contre, il multiplie des actes de provocation et d'exclusion comme le refus de reconnaissance du territoire de Minembwe. Quant à la communauté internationale, elle choisi les manœuvres dilatoires au sujet des investigations au fin de soustraire les responsables de ce crime de la justice.
3. Conséquences
Il serait tout à fait hasardeux de tenter de parler des conséquences d'un génocide aussi long que planifié. Les risques de manque d'exhaustivité sont évidents. Eu égard à ce qui précède, nous nous contentons de mentionner quelques unes de ces conséquences dans les lignes qui suivent :
• La mort des milliers de paisibles Banyamulenge dont des femmes, des enfants et vieillards ;
• La multiplication des orphelins, veuves et autres groupes d'indigents ;
• La naissance et le développement d'une culture de violence au Sud Kivu qui risque de prolonger la région dans une instabilité continue ;
• L'insécurité quasi chronique ;
• L'exile dans les pays limitrophes où les conditions de vie dans les camps des réfugiés les exposent à tous les dangers essentiellement le VIH/SIDA, la famine, l'analphabétisme, etc.
• La perte de confiance des Banyamulenge dans les institutions étatiques de la RDC;
• La pauvreté liée essentiellement aux mouvements de fuites et des déplacements internes au moment des violences ;
• La naissance et le développement du sentiment de criminalité ;
• Le développement de la méfiance mutuelle entre les Banyamulenge et les communautés voisines du Sud Kivu rendant la coexistence pacifique difficile ;
• Les viols sexuels avec toutes les conséquences qu'ils comportent du point de vue sanitaire ;
• La consolidation de la culture d'impunité ;
• La destruction des infrastructures socioéconomiques et le durcissement de la pauvreté au sein de la population du Sud Kivu ;
• La destruction des valeurs humaines, garantes de harmonie sociale ;
• Etc.
4. Pistes de solution et recommandations
Au vu de ce qui précède, la société civile des Banyamulenge demande ce qui suit :
• Rapatrier tous les réfugiés Banyamulenge se trouvant en dehors des frontières nationales et les intégrer sans condition dans la gestion du pays ;
• Mettre en place la politique de bonne gouvernance (transparence dans la gestion de la chose publique, équité et égalité de tous devant la loi, participation de la population à la prise des décisions qui l'intéressent, devoir de rendre compte qui incombe aux dirigeants, sens de responsabilité, réforme institutionnelle, accessibilité et indépendance de la justice, etc.) ;
• Punir sévèrement tous les auteurs des crimes commis à l'endroit des Banyamulenge (à leur degré de responsabilité différent). Cette justice nous semble une voie obligée en vue de la réconciliation des communautés du Sud Kivu ;
• Réparer, dans la mesure du possible, le préjudice tant moral que matériel dont la communauté Banyamulenge a subi en vue de lui redonner sa dignité humaine ainsi que le goût de revivre ensemble avec les autres composantes de la population du Sud Kivu ;
• Mettre fin à la discrimination ethnique dont sont victimes les Banyamulenge à travers les médias de la haine et punir sévèrement les responsables politiques qui se sont rendus tristement célèbres dans la diabolisations des Tutsi congolais aussi bien au niveau national qu'au niveau provincial;
• Organiser une campagne publique de réhumanisation des Tutsi longtemps présentés comme la source des malheurs en RDC ;
• Reconnaître sans délai le territoire de Minembwe, base de développement pour cette communauté ;
• Mettre en place des programmes cohérents et efficaces de lutte contre la pauvreté ;
• Désenclaver les hauts plateaux de Minembwe par l'instauration des infrastructures de développement (routes, hôpitaux, écoles, …) ;
• Mettre hors d'état de nuire toutes les forces négatives opérant au Sud Kivu en vue de redonner à la population une certaine confiance et bâtir une paix durable ;
• Mettre en place une structure décentralisée de dialogue, de vérité et de réconciliation ;
• Libérer sans condition tous les officiers Banyamulenge qui sont injustement aux arrêts ;
• Procéder au mixage de l'armée sans prendre les militaires Banyamulenge en dehors de leur région sachant qu'ils sont menacés d'extermination comme le reste de leur communauté, du moinsMEMORANDUM DE LA COMMUNAUTE BANYAMULENGE
Introduction
Ce mémorandum est produit par la société civile de la communauté Banyamulenge à l'occasion de la conférence sur la paix, la sécurité et le développement des provinces du Sud Kivu et du Nord Kivu, organisée par l'Etat congolais (RDC).
Son objectif est d'attirer l'attention de la communauté internationale sur les multiples violations des droits humains dont sont victimes les communautés Tutsi de la RDC et particulièrement les Banyamulenge.
Ce document partage l'expérience de la persécution dont les Banyamulenge ont été victimes depuis des décennies sur le territoire de leur propre pays. Il constitue en outre un véritable cri d'alarme lancé pour une population en danger, menacée d'extermination par les forces négatives et terroristes coalisées, en l'occurrence les Mai Mai congolaises, les EX-FAR/ Interahamwe rwandaises ainsi que les FN-Palipehutu burundaises avec la bénédiction et la complicité du gouvernement de Kinshasa.
Ce document est structuré en quatre points essentiels : une brève présentation des Banyamulenge, l'origine et le développement de la haine anti-tutsi/Banyamulenge en ex-Zaïre, les conséquences de cette situation ainsi que les propositions de solution à cette crise.
1. Brève présentation des Banyamulenge
Les Banyamulenge sont des Tutsi d'origine rwandaise basés sur les hauts plateaux du Sud Kivu à l'Est de la RDC. Selon des sources concordantes, l'établissement des Banyamulenge sur le territoire de l'actuel RDC s'est fait longtemps avant la colonisation de l'Afrique. Ils provenaient de la région de la rive Est de la rivière Ruzizi et du Lac Tanganyika.
D'après Depelchin, les Banyamulenge se trouvaient déjà établis dans la plaine de la Ruzizi entre 1797 et 1890 . Pour Kagame Alexis, les Banyamulenge auraient commencé à occuper l'actuel zone d'Uvira entre 1576 et 1609. Quant à Maquet JJ, l'établissement des Banyamulenge dans la zone d'Uvira se situe au début du 19e siècle.
Ces différents auteurs ont désigné ce peuple tantôt sous le terme 'Tutsi d'Itombwe', tantôt 'Pasteurs d'Itombwe' ou encore 'Banyarwanda'.
Les sources orales consignées par l'administration coloniale rapportent qu'après leur traversée de la Ruzizi, les Banyamulenge s'installèrent à Kakamba dans la plaine de la Ruzizi. Ils n'y resteront pas très longtemps car le climat semi-aride de la plaine, la malaria ainsi que la trypanosomiase bovine les avaient obligés de quitter ce milieu hostile à la vie. Ils arrivèrent ainsi à Mulenge (1800 m d'altitude) où ils s'établiront et deviendront, plus tard, leur grand centre, d'où le toponyme Banyamulenge.
Comme on peut le voir à travers ce rappel, ce peuple s'est installé sur le territoire de l'actuelle RDC il y a de cela plus ou moins 2 siècles. C'est-à-dire bien avant la création de l'Etat Indépendant du Congo (1885-1908), le Congo belge (1908-1960) et le Congo indépendant avec ses différentes appellations : République Démocratique du Congo à l'indépendance, République du Zaïre sous le régime de Mobutu avant d'être rebaptisé Republique Démocratique du Congo sous Laurent Désiré Kabila.
En dépit de ces preuves irréfutables, l'acceptation des Banyamulenge comme des Congolais à part entière a fait couler beaucoup de salive, d'encre et même de sang comme en témoignent les exemples suivants :
• En 1969, par sa lettre n° 212-2220-054-A.I.C-69 du 16 juin 1969 adressée au Commissaire de district du Sud Kivu, le citoyen Gouverneur de province du Kivu, M. TAKIZALA, précise que « les Banyarwanda d'Itombwe (Banyamulenge) sont parmi les ethnies fondatrices de l'Etat Indépendant du Congo et qu'ils sont congolais d'origine ».
• Dix ans après, le Mwami Lenghe, Chef de collectivité Bavila, écrivait dans sa lettre n° 5072/132/1979/FO3MCD/79 du 06 juin 1979, adressée au commissaire de région du Kivu : « l'établissement des Banyamulenge dans ma collectivité date de la fin du XVIIe et le début du 19e siècles. Ces dates sont le résultat d'une enquête minutieuse menée par moi auprès des vieux sages Bavira ».
Malgré tous ces aveux des responsables politiques, pour ne citer que ceux-là ; il est triste, regrettable et fort déplorable de voir que chaque fois que le besoin se présente des 'politiciens' avides du pouvoir n'hésitent pas à falsifier l'histoire pour des intérêts purement et simplement égoïstes et despotiques car ils ne trouvent pas mieux à proposer aux populations congolaises que la division, la discrimination, l'exclusion, la haine, la négation des droits de l'autre jusqu'aux plus élémentaires, y compris le droit à la vie.
2. Naissance et développement de la haine anti-Tutsi/Banyamulenge
• Origines de la haine anti-Tutsi en RDC
Pour bien comprendre les événements de notre temps, il est important si pas nécessaire de nous référer au passé. En effet, suite aux événements malheureux survenus au Rwanda en 1959 quand les premiers massacres collectifs et sélectifs contre les Tutsi furent organisés par les extrémistes hutu sous la houlette du pouvoir colonial ; un sentiment anti-tutsi s'est développé dans la région des Grands Lacs.
Le Tutsi fut alors défini et identifié comme ennemi des Hutu, avec comme argument que les Tutsi, ces 'envahisseurs' minoritaires ne devaient pas diriger les Hutu majoritaires.
L'avènement des régimes de la première et la deuxième république au Rwanda n'a pas du tout contribué à améliorer la situation au Rwanda. Bien au contraire, les divisions ont été cultivées et renforcés mais aussi extrapolées et exportées au delà des frontières nationales. Il s'agissait en réalité de créer une sorte de conscience collective 'bantoue' contre les Tutsi par tous les moyens y compris le génocide.
L'Est de l'ex-Zaïre, zone où se trouvent beaucoup de Rwandophones rendus Congolais par Berlin pour avoir délimité les frontières entre les Etats de manière arbitraire, fut la première destination de cette idéologie. Fondée sur la haine ethnique, celle-ci a fort malheureusement réussi a gagné du terrain et à conquérir des esprits naïfs envahissant ainsi les pays voisins du Rwanda si bien que la question ethnique (hutu-tutsi) a été internationalisée et est actuellement devenue le virus qui ronge la région des Grands Lacs. Ses victimes se comptent aujourd'hui en terme des millions : morts, réfugiés, déplacés, orphelins, veuves et un cortège de malheurs devenus presque le quotidien des habitants de cette région : famine, guerre, massacres, génocide, viols, etc.
Sans prétendre être exhaustif, voici la chronologie du développement de la haine anti-tutsi à travers ses faits marquants.
• Sous le régime de Mobutu
A l'occasion de l'accession du pays à l'indépendance, des conflits entre les Banyamulenge et les autres communautés étaient déjà perceptibles. En 1964 éclate la rébellion muléliste. Partie de l'Ouest du pays, celle-ci atteindra la partie Est de la RDC la même année. En 1965, Mobutu prend le pouvoir. Jusqu'alors il n'y avait vraiement pas des conflits majeurs déclarés entre les Banyamulenge et leurs voisins Bafulero, Bavira, Babembe, etc.
Les Banyamulenge ralliés au pouvoir central s'attireront la haine des autres communautés qui étaient plutôt rangées du côté de la rébellion. Voilà ce qui explique que l'insurrection qui, au départ était dirigée contre le pouvoir de Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa) s'est subitement transformée en véritable chasse aux Banyamulenge.
Comme ils combattaient aux côtés des forces loyalistes, les Banyamulenge se sont vus attaquer par leurs voisins. Beaucoup de gens furent tués et leurs biens spoliés. Il y eut les massacres sélectifs de Kirumba (19/02/19966), de Gahwera (juin 1966), de Gatongo (16/08/1966), etc. qui ont fait des centaines des victimes parmi les Banyamulenge.
Entre 1964 et 1984, l'Est de l'ex-Zaïre a été déchirée par cette rébellion qui a fait beaucoup de victimes et de dégâts matériels. Certaines de ses figures de proue ont fait leur réapparition tout récemment, lors de la guerre dite « première guerre de libération », en 1996. Il s'agit entre autres de Laurent Désiré Kabila, ancien chef rebelle dans le maquis de Hewa bora dans la zone de Fizi, de Dunia Aochi, de Ndalo Shabani et de Zabuloni et autres seigneurs de guerre qui aujourd'hui sont devenus des commandants supérieurs de l'armée de Joseph Kabila au sein de laquelle ils occupent des postes stratégiques.
L'année 1984 correspond à la fin de la rébellion muléliste. Mais en réaliste cette année ne marque pas la fin des conflits à caractère ethniques entre les Banyamulenge et leurs voisins.
Certains hommes politiques originaires du Sud Kivu dont Anzuluni Bembe (ancien président de l'Assemblée Nationale Zairoise) et Mwenemalungu (ancien député au parlement) soutenus par le régime de Kinshasa d'alors firent également de la haine contre les Banyamulenge leur cheval de bataille dans les campagnes électorales et chaque fois qu'ils voulaient déstabiliser le Sud Kivu pour se maintenir au pouvoir. Ils alors appelés à plusieurs reprises les populations locales à éliminer physiquement les Banyamulenge et à expulser les rescapés au Rwanda.
Si ce désir ardent n'avait pas été accompli alors, les Banyamulenge avaient été fréquemment victimes de divers supplices, des tortures psychologique, politique et physique (emprisonnements arbitraires et répétitifs, refus de droit d'élire et d'être élu, scènes d'humiliations publiques par l'armée et autres instances de sécurité, etc.).
Dans les années 1990, un slogan se développe dans le Sud Kivu, de Bukavu à Fizi en passant par Uvira, Baraka et d'autres centres côtiers du lac Tanganyika : RRRR (Recensement de Rendre les Rwandais au Rwanda). Ces Rwandais dont il est question ici ne sont autres que les Banyamulenge. Au même moment, un recensement des Banyamulenge est organisé par le pouvoir central sur instigation des hommes politiques originaires du Sud Kivu, afin de connaître le nombre des ces 'étrangers' avant de les expulser vers le Rwanda. Entre temps, les attaques mortelles sont régulièrement organisées contres les pâturages des Banyamulenge, les persécutions, les tortures par l'armée et les services secrets ainsi que les pillages systématiques.
L'idéologie génocidaire contre les Banyamulenge a atteint son paroxysme entre 1993 et 1995. L'arrivée des réfugiés Hutu Burundais et Rwandais du Président Melchior Ndadaye pour les premiers, la guerre et le génocide pour les seconds ont contribué à l'exacerbation de la haine contre les Tutsi congolais que les réfugiés assimilaient aux Tutsi de leurs pays respectifs et qui, en réalité, étaient des témoins gênants pour la création d'une base arrière en RDC en vue d'une éventuelle reconquête du pouvoir au Rwanda et au Burundi.
En 1996, la guerre qui a éclaté contre le régime de Mobutu à partir de l'Est de la RDC a servi de prétexte pour les autorités en vue d'exécuter leur plan génocidaire contre les Tutsi. Elles s'associent aux milices Interahamwe bien 'expérimentés' en matière de génocide après le forfait qu'il avait commis sur les Tutsi du Rwanda en 1994. Au nom de la famille bantoue, les populations locales (Bashi, Babembe, Bavira, Bafulero, etc.) sont vite mobilisées pour exterminer les Tutsi congolais dans le plus bref délai sous le même mobile ethnique.
Ainsi seront organisés les massacres de Bibogobogo, d'Uvira, de Bukavu, de Kamanyola au Sud Kivu et en beaucoup d'autres localités au Nord Kivu, etc. Les populations qui qui n'ont pas fui vers le Rwanda sont réduites au silence et sporadiquement attaquées par les Mai Mai (milice tribale progouvernementale et anti-tutsi). Il s'agit dans toutes ces situations des violations des droits de la personne institutionnalisées par l'Etat.
• Sous Kabila I
L'arrivée de Laurent Désiré Kabila au pouvoir n'a fait qu'empirer la situation des Banyamulenge qui l'avaient pourtant accompagné dans sa longue et pénible marche vers le pouvoir jusqu'à Kinshasa. Après le divorce avec ses alliés Rwandais et Ugandais consommé en juillet 1998, une nouvelle guerre éclata encore à partir de l'Est du pays. Kabila organise la chasse à l'homme Tutsi dans toutes les villes de la RDC. Il commence par les militaires, ceux-là même qui ont combattu pour lui. Il développe une exceptionnelle méchanceté de la population à procéder à l'épuration ethnique des Tutsi et de tous ceux qui leur ressemblent.
Pour y parvenir, il s'entoure d'hommes extrêmement dangereux et extrémistes à l'instar d'un Yerodia Abdoulaye Ndombasi ancien ministre des affaires étrangères et plus tard Vice-président de la république sous Kabila II, récompensé justement pour sa haine prononcée contre les Tutsi. En plus d'un discours à l'accent fasciste, Yerodia est connu pour avoir orchestré les actes de barbarie commis à l'endroit des Tutsi tant civils que militaires dans la ville de Kinshasa. Ce sont ces crimes dont il a à rendre compte devant la Cour Pénale Internationale.
Comme dans tous les génocides, Yerodia, psychanalyste de formation, recourt à la chosification, à la diabolisation de la personne des Tutsi pour effacer les hésitations de la population à tuer, ce qu'il a réussi ! Dans cette logique, il qualifie les Tutsi, et dans les médias, 'des vermines à écraser'.
Comme si cela ne suffisait pas, son Président et ami Laurent Désir é Kabila, faisait des appels pressants en vue d'exterminer les Tutsi. Nous en voulons pour preuve l'extrait de l'un de ses discours génocidaires : « Prenez les lances, flèches, armes…sinon on deviendra esclaves des Tutsi ».
L'une de nombreuses conséquences de cet appel médiatisé fut les massacres sélectifs de 300 sous officiers Tutsi congolais du camp de Kamina en 1998. Pour y parvenir, Kabila a dépêché l'ancien Chef d'Etat major à la présidence, le Colonnel Eddy Kapend avec le Médecin directeur de l'hôpital de la base de Kamina, le Major Vangu en vue d'exterminer les candidats officiers Tutsi. Ces Tutsi furent systématiquement tués par leurs compagnons d'armes à l'instigation de ces hauts responsables sous l'admiration et l'applaudissement de leurs instructeurs Tanzaniens, gagnés eux aussi par l'idéologie bantoue.
La haine ethnique contre les Tutsi, ainsi entretenue et attisé par les sommités de l'Etat ne pouvait que gagner une grande partie de la population. Au Sud Kivu, les relations entre les Banyamulenge et leurs voisins ont été plus envenimées par ces intoxications entraînant ainsi une série de tueries sélectives cycliques qui ont plongé la communauté Banyamulenge dans un deuil interminable qui dure maintenant plus d'une décennie.
• Sous Kabila II
'Tel père, tel fils' dit la sagesse populaire. Joseph Kabila qui passait ironiquement pour sérieux et compréhensif aux yeux de beaucoup de gens n'a pas tardé à prouver qu'il est réellement fils de Kabila et ainsi dévoiler sa vraie face : celle qui le fait ressembler le plus à son père. Sa ruse est ornée d'une méchanceté énorme.
Peu après l'assassinat de son père en 2000, il affiche sa ferme volonté à poursuivre l'idéologie ethnique de feu son père. Pour preuve il nomme Yerodia, criminel de renom, Vice-Président de la république bien que ce dernier soit poursuivi pour crime de génocide perpétré à l'endroit des Tutsi. Ainsi Kabila va s'investir, corps et âme, dans la négation du génocide en protégeant les génocidaires venus d'autres cieux. Plus stratège que son père, il crée et/ou encourage les médias de la haine pour nourrir de son idéologie la plus grande partie de sa population. Le site internet « www.
digitalcongo.net » tenu sa sœur, les journaux comme l'Avenir et demain le Congo ainsi que la Radio-Télévision Nationale du Congo (RTNC) constituent les principaux canaux d'endoctrinement à l'idéologie de la haine anti-tutsi.
A titre d'exemple, Demain le Congo affirmait gratuitement fin 2003, que les guerres qui ont secoué la RDC depuis 1996 ont fait 3. 500 000 victimes parmi lesquelles aucun Munyamulenge ! Ce n'est pas parce que ce journal n'était pas au courant que des milliers des Banyamulenge avaient été tué mais parce que sa volonté, son souhait est de las voir exterminer.
Ah, quelle méchanceté, quelle banalisation des événements malheureux qui ont endeuillé continuellement tout un peuple ! Par ailleurs, une des associations des droits humains basée à Kinshasa a eu le courage de dénoncer, mi 2003, le ton génocidaire qu'ont adopté beaucoup d'organes de presse en RDC.
Comme pour 'décentraliser' la campagne de haine ethnique contre le Banyamulenge, les médias ainsi que la société civile de Bukavu au sein de laquelle l'Eglise catholique de Bukavu joue un rôle de premier plan, ont multiplié l'effort d'intoxication ethnique. Il s'agit notamment de la Radio Maria, de la Radio Maendeleo et de la RTNC agence du Sud Kivu.
A plusieurs reprises, ces médias ont préconisé l'extermination des Banyamulenge ou tout au moins leur expulsion comme 'solution finale'. Mais solution à quel problème ? En quoi la physionomie d'un peuple peut-elle être un problème ? Quelle est la forme morphologique qui convient pour se faire accepter au Sud Kivu ?
Suite à cette propagande haineuse par les médias, des populations innocentes Tutsi à Bukavu furent inhumainement tuées entre fin mai et mi juin 2004 par des éléments de la 10e région militaire sous le commandement du Général Mbudja Mabe. La volonté de Joseph Kabila de commettre le génocide contre les Banyamulenge se révèle également à travers la nomination des officiers à la tête de la 10e région militaire (Sud Kivu).
Après le Général Nyabyolwa qui avait reçu officiellement la mission de détruire l'ancienne armée du RCD, en utilisant tous les moyens y compris les tueries des civils innocents et les arrestations arbitraires des officiers à l'insu de son adjoint d'alors, le Colonnel Jules Mutebutsi ; c'était le tour de Général Mbudja Mabe, aussi méchant que son prédécesseur.
C'est lui qui a dirigé la réunion qui a préparé et exécuté le génocide des Banyamulenge réfugiés dans le camp de Gatumba, au Burundi. Si non comment expliquer que les auteurs du forfait de Gatumba soient venus du territoire congolais (Kiliba) où ils se sont repliés après le carnage sans être inquiétés, jusqu'à maintenant ?
Des sources dignes de foi précisent que Mbudja Mabe était entouré des Colonels Mai Mai Dunia, Kayamba et Nakabaka très connus dans la région pour leur extrémisme contre les Tutsi. Ce dernier, commandant de la brigade qui contrôlait alors Uvira n'hésitait pas personnellement à réfuter la nationalité des Banyamulenge arguant que si ceux-ci ne veulent pas 'chez eux' (sous entendu au Rwanda), il résoudra la question à sa manière. Chose promise chose due : il viole les frontières pour aller exterminer les Banyamulenge au Burundi où ils s'étaient réfugiés.
Chose criante, Kabila II a délibérément renforcé les liens avec toutes les forces négatives qui opèrent à l'Est de la RDC dont les Mai Mai, les FNL-PALIPEHUTU du Burundi, les ex-FAR/Interahamwe. Cette coalition génocidaires est responsable du génocide de Gatumba qui a coûté la vie à 166 personnes et rendus des dizaines d'autres vulnérables, incapables de se prendre en charge. Cette barbarie humaine survenue dans la nuit du 13/08/2004 a eu lieu au vu et au su de la communauté internationale, représentée au Burundi par l'ONUB dont le silence jusqu'à cette date laisse songeur.
Depuis ce forfait, le régime de Kinshasa n'a jamais posé un geste de nature à rendre justice : punir les coupables et réhabiliter les victimes. Par contre, il multiplie des actes de provocation et d'exclusion comme le refus de reconnaissance du territoire de Minembwe. Quant à la communauté internationale, elle choisi les manœuvres dilatoires au sujet des investigations au fin de soustraire les responsables de ce crime de la justice.
3. Conséquences
Il serait tout à fait hasardeux de tenter de parler des conséquences d'un génocide aussi long que planifié. Les risques de manque d'exhaustivité sont évidents. Eu égard à ce qui précède, nous nous contentons de mentionner quelques unes de ces conséquences dans les lignes qui suivent :
• La mort des milliers de paisibles Banyamulenge dont des femmes, des enfants et vieillards ;
• La multiplication des orphelins, veuves et autres groupes d'indigents ;
• La naissance et le développement d'une culture de violence au Sud Kivu qui risque de prolonger la région dans une instabilité continue ;
• L'insécurité quasi chronique ;
• L'exile dans les pays limitrophes où les conditions de vie dans les camps des réfugiés les exposent à tous les dangers essentiellement le VIH/SIDA, la famine, l'analphabétisme, etc.
• La perte de confiance des Banyamulenge dans les institutions étatiques de la RDC;
• La pauvreté liée essentiellement aux mouvements de fuites et des déplacements internes au moment des violences ;
• La naissance et le développement du sentiment de criminalité ;
• Le développement de la méfiance mutuelle entre les Banyamulenge et les communautés voisines du Sud Kivu rendant la coexistence pacifique difficile ;
• Les viols sexuels avec toutes les conséquences qu'ils comportent du point de vue sanitaire ;
• La consolidation de la culture d'impunité ;
• La destruction des infrastructures socioéconomiques et le durcissement de la pauvreté au sein de la population du Sud Kivu ;
• La destruction des valeurs humaines, garantes de harmonie sociale ;
• Etc.
4. Pistes de solution et recommandations
Au vu de ce qui précède, la société civile des Banyamulenge demande ce qui suit :
• Rapatrier tous les réfugiés Banyamulenge se trouvant en dehors des frontières nationales et les intégrer sans condition dans la gestion du pays ;
• Mettre en place la politique de bonne gouvernance (transparence dans la gestion de la chose publique, équité et égalité de tous devant la loi, participation de la population à la prise des décisions qui l'intéressent, devoir de rendre compte qui incombe aux dirigeants, sens de responsabilité, réforme institutionnelle, accessibilité et indépendance de la justice, etc.) ;
• Punir sévèrement tous les auteurs des crimes commis à l'endroit des Banyamulenge (à leur degré de responsabilité différent). Cette justice nous semble une voie obligée en vue de la réconciliation des communautés du Sud Kivu ;
• Réparer, dans la mesure du possible, le préjudice tant moral que matériel dont la communauté Banyamulenge a subi en vue de lui redonner sa dignité humaine ainsi que le goût de revivre ensemble avec les autres composantes de la population du Sud Kivu ;
• Mettre fin à la discrimination ethnique dont sont victimes les Banyamulenge à travers les médias de la haine et punir sévèrement les responsables politiques qui se sont rendus tristement célèbres dans la diabolisations des Tutsi congolais aussi bien au niveau national qu'au niveau provincial;
• Organiser une campagne publique de réhumanisation des Tutsi longtemps présentés comme la source des malheurs en RDC ;
• Reconnaître sans délai le territoire de Minembwe, base de développement pour cette communauté ;
• Mettre en place des programmes cohérents et efficaces de lutte contre la pauvreté ;
• Désenclaver les hauts plateaux de Minembwe par l'instauration des infrastructures de développement (routes, hôpitaux, écoles, …) ;
• Mettre hors d'état de nuire toutes les forces négatives opérant au Sud Kivu en vue de redonner à la population une certaine confiance et bâtir une paix durable ;
• Mettre en place une structure décentralisée de dialogue, de vérité et de réconciliation ;
• Libérer sans condition tous les officiers Banyamulenge qui sont injustement aux arrêts ;
• Procéder au mixage de l'armée sans prendre les militaires Banyamulenge en dehors de leur région sachant qu'ils sont menacés d'extermination comme le reste de leur communauté, du moins