Wednesday, August 27, 2025

Les forces de réserve Wazalendo se sont retournées contre leurs propres commanditaires.

Uvira – le 25 Août,2025

« les forces de réserve » (Wazalendo) se sont retournées contre leurs propres commanditaires. Le 20 avril 2023, le Parlement de la RDC a adopté une nouvelle loi visant à intégrer les groupes armés au sein des forces de défense nationale. Il s'agissait d'un amalgame de miliciens, de civils armés et de criminels munis d'armes blanches. Aucun processus ni aucune condition ne permettait une collaboration harmonieuse avec l'armée nationale. La loi stipulait simplement que les forces de défense intégreraient « des volontaires civils activement engagés dans la défense du pays et de son intégrité territoriale face à une menace ou une agression extérieure ». Par la suite, la hiérarchie militaire a intégré des groupes armés locaux (Mai Mai et FDLR) dans le système de défense nationale. Lors de l'adoption de cette loi, j'avais averti que ces groupes armés constitueraient un jour une menace sérieuse pour les communautés ciblées par leurs attaques (ceux qui sont historiquement persécutés), pour l'ensemble de la population congolaise et pour l'armée nationale elle-même. Tout commence par des attaques contre les Banyamulenge à Uvira. Il y a une semaine, un commandant de l'armée nationale, Colonel Patrick Gisore, issu de la communauté Banyamulenge est décédé tragiquement dans un accident d'avion, en compagnie de son épouse. Tous deux ont perdu la vie. Conformément aux traditions Banyamulenge, qui accordent une grande importance à l'enterrement des proches, les corps de cet officier supérieur et de son épouse ont été transportés à Uvira. La hiérarchie militaire de la RDC à Kisangani a confié leur prise en charge aux officiers basés à Uvira. Les corps ont été déposés dans une morgue. Le jour des funérailles, les forces de réserve ont tendu une embuscade à quatre bus transportant des civils Banyamulenge en route de Bujumbura vers Uvira. Elles ont ouvert le feu, sans être interceptées ni par l'armée ni par la police. La raison de ces attaques est tout simplement parce qu'ils sont de "Banyarwanda" (pour signifier les Tutsi). Par ailleurs, un autre bataillon des forces de réserve a attaqué une foule de membres de la communauté Banyamulenge lors de la cérémonie funéraire. Les violences ont duré plus de deux heures, sans aucune intervention des autorités locales. Le porte-parole du gouvernement, a manqué l'occasion d'inviter les habitants d'Uvira à se faire photographier avec les membres de la communauté Banyamulenge, afin de "montrer au monde entier qu'ils vivent en paix avec leurs voisins". Les Wazalendo et les attaques contre leurs maîtres Peu après, les forces de réserve ont même retourné leurs armes contre des soldats de l'armée nationale. Les batailles ont duré des heures. Au moins 36 Wazalendo et six militaires ont été tués dans ces affrontements. Des civils innocents auraient également perdu la vie. Que faut-il retenir de ces événements ? 1. L'une des principales raisons pour lesquelles les , les mercenaires roumains, les groupes armés (Wazalendo), la et les FDLR ont perdu les batailles à Goma et Bukavu est qu'il est impossible de commander une multitude de forces motivées par la haine envers certains groupes sociaux, mais aussi à cause de l'intégration illégale de criminels dans les forces nationales. 2. L'armée nationale est incapable de contrôler ou désarmer ses propres forces de réserve. 3. Les chefs militaires de l'armée congolaise sont juste capables d'organiser des attaques contre les populations civiles mai se sont montrés incapables d'organiser même les funérailles de l'un de leurs officiers supérieurs. 4. Le phénomène Wazalendo illustre parfaitement l'irresponsabilité de l'État congolais, qui sous-traite la sécurité nationale à des criminels. 5. Les élites du gouvernement encouragent la formation de groupes armés tribaux pour accroître leur visibilité et mobiliser le soutien populaire. Les forces de réserve (Wazalendo) sont armées grâce aux fonds publics ou aux munitions issues de la contrebande de minerais exploités dans les mines contrôlées par l'État. 6. Ces forces de réserve (Wazalendo) non seulement se retournent contre la population – qui constitue pourtant la principale ressource humaine ainsi que le capital social et économique du pays, et qui a déjà été privée de l'accès aux fonds publics – mais ils s'attaquent aussi à l'armée nationale, pourtant recrutée et entraînée avec des moyens publics. Paradoxalement, ils apparaissent à la fois comme les alliés et les ennemis de tous. 7. Pour ceux qui affirment que les Wazalendo sont manipulés par "un ennemi", même si cela était vrai, aucune autorité intelligente n'oserait tenir de telles déclarations, car cela révélerait une grande faiblesse de l'appareil sécuritaire. Et pourquoi des troupes écouteraient-elles mieux leurs ennemis que leur propre hiérarchie ? 8. Il a été très facile d'armer les groupes armés. Il faudra plus de 25 ans à l'armée nationale pour retirer ces armes de la population et rétablir le monopole de la violence légitime. Les Nations unies et les pays puissants savent — et apprécient — que la RDC restera paralysée encore pendant plus d'un quart de siècle.

Par Alex Ntung. PhD